Moustapha Samb : AHMADOU BAMBA, LE
MISSIONNAIRE UNIVERSEL, Le nègre international

Qui est Ahmadou Bamba ? Sur lui tant de choses ont été dites
et tant de choses restent encore à dire. Notre tradition orale a
fait qu’une bonne partie des informations que nous savons de
lui nous sont parvenues par ce qui a été raconté par lui-même,
ses disciples, ses contemporains etc. Cheikh Ahmadou Bamba
lui-même a laissé des écrits dans lesquels il n’a pas manqué de
raconter certaines péripéties de sa vie.
C’est dans cette dynamique que s’inscrit l’ouvrage de
Moustapha Samb qui, au-delà de son statut d’intellectuel, (il
est maitre de conférences de rang magistral à l’Université
Cheikh Anta Diop de Dakar et ancien directeur des études du
CESTI), laisse apparaître les penchants d’un disciple mouride.
D’ailleurs, il précise dans sa Dédicace que son père a attiré
son attention sur Serigne Touba.
Cheikh Ahmadou Bamba, Khadimou Rassoul est né à une
période marquée par la colonisation et la volonté de celle-ci

d’asservir l’homme noir. Partout en Afrique, les résistants à
cette colonisation occidentale étaient pourchassés, soit exilés
soit tués : Lat Dior, Samory Touré, El Hadji Omar Tall etc.
C’est dans un tel contexte que naquit celui qui deviendra plus
tard l’ennemi n°1 des colons. Ces derniers, nous y
reviendrons, ont tout tenté, par tous les moyens et à plusieurs
reprises d’empêcher l’essor de la dynamique de Cheikh
Ahmadou Bamba.
Pour l’auteur et pour les disciples mourides, Cheikh Ahmadou
Bamba fut un homme exceptionnel, un fervent musulman qui
a opposée à la puissance coloniale la force inébranlable de la
foi en Dieu. Plusieurs épisodes de sa vie confortent cette thèse
notamment sa fameuse prière au bureau du gouverneur à Ndar
(Saint Louis du Sénégal).
Moustapha Samb est largement revenu sur les passages
marquants de la vie du saint homme, notamment son exil dont
le départ est fêté chaque année par la communauté mouride
(Magal), son assignation en résidence en Mauritanie et à
Diourbel, les miracles qu’il a accomplis comme la prière
effectuée en plein océan atlantique ainsi que les tentatives
avortées d’assassinat dont il a fait l’objet. Sérigne Touba a
opposé une résistance pacifique, spirituelle aux colons mais
aussi il a fondé une confrérie, le Mouridisme basée sur le
travail et le culte de Dieu.
C’est la raison pour laquelle, comme le souligne l’auteur, il
avait de plus en plus de disciples et cette expansion
du Mouridisme et au-delà de l’Islam dérangeait l’entreprise
coloniale jusqu’à son plus haut niveau.
Si l’on en croit l’auteur, les colons surveillaient Cheikh
Ahmadou Bamba comme du lait sur le feu. Ils l’ont aussi
calomnié, accusé à tord et assigné en résidence. Ce qui, selon
Moustapha Samb, n’a pas empêché le serviteur du prophète

Mohamed (PSL) de remplir sa mission, une mission divine du
reste grâce au soutien et à la volonté d’Allah.
Mais au-delà de la narration et de la description, ce que
l’ancien directeur des études du CESTI veut nous faire
comprendre, c’est que des hommes de cette dimension,
africains, noirs, musulmans et sénégalais du reste doivent être
valorisés aux yeux des populations et de la jeunesse en
particulier. Leur histoire doit être enseignée à l’école pour
qu’elle soit connue de tous mais aussi pour qu’elle ne soit pas
déformée.
Il apporte son éclairage aussi pour adresser une sorte de
réponse aux détracteurs du « Sheikh », notamment à ceux qui
contestent certains miracles attribués à Khadimou Rassoul
sans pour autant oublier de parler de certains de ses grands
disciples en particulier Cheikh Ibra Fall.
L’auteur n’a pas aussi manqué d’évoquer l’apport
du Mouridisme dans La vie et le développement du Sénégal,
qu’il s’agisse de l’agriculture, de la littérature, de l’art, de
l’architecture et du mode vestimentaire.
Il termine son Essai consacré au Sheikh à relater mais aussi à
rétablir les faits historiques en écrivant ; « qu’   Il faut
reconnaître que Cheikh Ahmadou Bamba était un homme
extraordinaire. Aussi bien pour ses contemporains que pour
les générations qui ont entendu parler de cet homme atypique
dont l’histoire est avare. » (p.131)
Nous estimons que le travail de Moustapha Samb est à saluer,
car au-delà de la vie et de l’œuvre de Cheikh Ahmadou
Bamba, les intellectuels sénégalais doivent s’intéresser à
l’histoire des dignes fils du Sénégal, la réécrire et se
l’approprier pour qu’elle nous serve d’inspiration et de
repères ; d’autant plus qu’aujourd’hui nous sommes en face
d’une jeunesse sans repères et en quêtes de valeurs qui vont

au-delà de nos frontières. Combien d’ « hommes de Dieu »
sénégalais sont encore ignorés aujourd’hui par les Sénégalais ?

Ngor DIENG
Psychologue conseiller/Philosophe
ngordieng@gmail.com